Le réconfort
Dans le silence du ciel.
L'inouïe envie sensible enfin.
Témoignage d'une solitude.
Et puis rentrer dans la ville,
Près des canaux lustrés
Par le parfum de quelques roses.
Gérard Roussel
Extrait de "La voix peinte"
J’ai de toi une silhouette
Perdue sur une photo grise,
Un jour de froid, un jour de bise,
Une pellicule un peu bête.
Comme une hirondelle aux cieux,
J’ai ton visage dans ma tête,
Je te sentais si proche, faite
Au désir, multiple de deux.
Où es-tu, si proche et si loin,
Partie dans un silence lourd
Ne me laissant qu’un trait d’amour
Et ta douce odeur dans mes mains.
Philippe A. Boiry
PROMENADE AU JARDIN
Donne-moi ta main, gentille petite Marie,
Et viens dans ce jardin où tout sourit,
Par cette matinée de ce doux et gai printemps,
Ce grand jardinier que nous attendions tant.
Admirons les fleurs, ces pures merveilles,
Toutes si éclatantes et radieuses au soleil,
Apaisons nos tourments en ce frais paradis,
En buvant à la source, dans nos paumes réunies.
Dans le chemin pierreux, les corolles sont ouvertes,
La glycine dont les larmes nous sont offertes,
Dispense son parfum le long du petit mur,
Les roses ont les joues en feu, et la brise murmure.
Les pétales sont tombés des branches du pommier,
Se dispersant en mille taches délicates et colorées,
L'herbe, déjà haute, est d'un vert le plus tendre,
Ce somptueux renouveau ne cessera de surprendre.
Tout est calme et pur, comme les perles de rosée,
Entre les pierres moussues court un scarabée,
Donne-moi ta main, gentille petite Marie,
Et restons dans ce jardin où tout sourit…
Christian Blanchard
LE PECHEUR
En allant taquiner le goujon
Le pêcheur fait un retour aux sources.
Si son but est de surprendre le poisson,
Il sait aussi que mille ressources
Raviveront son âme et son cœur
Et que c’est tout près de la nature
Que l’humain trouve le vrai bonheur,
Dans un silence, un calme qui dure …
Son regard se repose et s’emplit
D’images dont jamais on ne se lasse.
Son oreille jusqu’aux creux des remplis
Vibre d’euphorie quand la bécasse,
La mésange, le merle poussent leur chant.
Plaisirs de suspens et de l’attente :
L’instant où le lombric alléchant
Signalera par une descente
Brusque du bouchon, l’onde en frissons
Qu’un festin a mordu à l’hameçon.
Geneviève Thibert
AU PAYS DES MERVEILLES
Quand discrètement je pénètre
Dans cet univers de beauté,
Et que se ferme au-dessus de ma tête
La porte d'un monde de cruauté.
Alors ce corps criblé par la douleur
Se sent libéré.
Confié délicatement, au sein de la mer
Où n'existe aucune dissemblance
C'est là, que mon corps criblé par la douleur
Se sent libre, libre en profondeur.
Ce corps inerte gracieusement se faufile,
Dans un monde magique,
Pour pénétrer loin, plus loin encore
Dans cet univers féerique.
Mystérieuse beauté, parfaite création
Qui accueille dans ton sein
L'imparfait !
Comme pour en prendre soin.
Merci mille fois
Merci à toi,
Pour qui la différence n'existe pas,
Merci pour la joie
Que je ressens à chaque fois.
A Yannick
Sonia Rupp
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CONCERTO
J'attendais un bonheur et je fermais les yeux …
Des sons enveloppants glissaient pleins d'harmonie ;
L'archet en modulait la richesse infinie
Et je m'abandonnais dans leur cocon soyeux.
La voix du violon était caresse et charme.
Ses notes doucement posaient une question ;
Répandaient la ferveur et les mots de passion
Qu'un vibrato laissait mourir dans une larme.
Un instant d'éternel, puis un nouveau départ :
Lente, la mélodie offrant sa plénitude
Chantait la majesté, pleurait sa solitude
En sanglots empruntés au royaume de l'Art.
Vive, la danse entra dans un bouquet sonore
Avec des pas rythmés, aériens et joyeux.
L'artiste donnait vie au ballet merveilleux
Où valsait une jupe ample et multicolore.
C'était bien le prélude au mouvement final :
La fougue et le brio nés du plaisir intense
Éclataient dans l'ampleur, la joie et l'espérance.
Là, tout était Musique et rien n'était banal.
Poète en l'auditoire ou seule en ma chaumière ?
Qu'importe ! Un violon dans mon cœur émergeait,
Jouant l'ultime accord au long de son archet
Dans un élan d'amour, de paix et de lumière.
Simone Boinot
TOUT EST BEAU CE SOIR !
Tout est plaisir
Comme un moment de pose …
Comme un moment de PAIX
Où le temps se repose …
Pour tout recommencer …
Comme une confidence … qui nous appartiendrait
Comme un jardin d'enfance … où tout refleurirait
Comme une belle espérance … qui voudrait tout donner …
Comme un beau rêve bleu … qui semble dire "bonjour"
Comme un printemps heureux … du soleil des beaux jours
Comme un cadeau des cieux … posé sur du velours …
… Un croissant de lune
Sourit dans le ciel
Offrant la fortune
Comme une étincelle
Instant de plaisir
Une rose à offrir
Tendre solitude
Merveilleux prélude
Couleur de l'ESPOIR
Tout est beau ce soir.
Marie David C.
RÉGÉNÉRATION
Laisse les alizés jouer avec tes cheveux,
Laisse le sable fin t'accueillir sur la grève,
Laisse l'azur profond se mirer en tes yeux,
Et la nature orner l'esquisse de ton rêve…
Il fait bon se détendre à l'ombrage d'un pin,
Il fait bon admirer la mer sous la ramure,
Il fait bon s'affranchir du besogneux chemin,
Et s'en aller flotter comme l'écume pure…
Reste dans un éden où s'immole tout bruit,
Reste uniment baignée en la chaude lumière,
Reste avec la clarté qui repousse la nuit,
Et deviens réceptive à l'osmose première…
Contemple la lueur du soleil vespéral,
Contemple les reflets de son incandescence,
Contemple l'harmonie au rythme pastoral,
Et partages-en bien toute la quintessence…
Il est doux de voguer dans un songe béni,
Il est doux d'écouter les sylphes du rivage,
Il est doux de se fondre en l'espace infini,
Et d'être ressourcée au clair du paysage…
Emplis tes yeux de ciel, de mer et de beauté,
Emplis ton cœur d'amour, d'exquise délivrance,
Emplis de paix ton âme avec sérénité,
Et grâce à ce bonheur, rayonne d'espérance…
Liliane Codant
PLANTES TINCTORIALES
Gaude,
Garance,
Indigo,
Ou pastel
Sans vous que la vie serait triste
Sans notre ration de couleur quotidienne
Éclairez-nous !
Embrasez-nous !
Donnez-nous des teintes bleutées
Plus sombres que la mer orageuse
Offrez-nous des coloris très doux
Plus tendres qu'un ciel matinal.
Marie-Noëlle Hopital
VIVRE
L’instant présent
Tu te presses, tu cours sans cesse,
Tu te projettes déjà dans l’avenir.
Bois doucement au calice de la vie.
Profite de l’instant présent
Qui est déjà passé
Dès que tu l’as prononcé.
Toi et moi, on se connaît bien,
On court déjà après demain.
La vie, c’est comme un bon vin ;
Tu la humes pour commencer ;
Tu la savoures avant de la goûter ;
Tu en imprègnes finement ta bouche ;
Tu la retiens, un instant, entre tes dents.
Tu dégustes la vie comme un beau fruit
Car tu dis qu’il en a fallu du travail,
Pour qu’elle soit réussie.
Alors, tu la chantes comme une chanson,
Tu la fais résonner comme le son du cristal.
Tu bois en elle, comme l’on boit une bonne
Bouteille, à t’en fendre le cœur, jusqu'à la lie.
Tu trouves la vie pas mal sauf qu’on y perd des êtres chers.
Alors, tu la partages en famille ou avec tes amis,
Car tu aimes la convivialité et tous les plaisirs de la vie.
Quand tu seras vieux, tu aimerais vivre
Dans un chalet pour regarder tomber la neige.
Aujourd’hui, c’est l’été, et pourtant déjà,
Au fond de toi, tu entends tomber la neige.
Je remercie notre ami Jean-Claude de m’avoir inspiré ces quelques lignes
Marie-France Moriaux
PLAISIR…
On dirait que les survivants de ces générations formées par le plaisir, en ne se refusant rien, ont appris à se passer de tout…
Le dialogue des Carmélites. Georges Bernanos.
Serait-ce qu’à trop consommer de plaisir on puisse s’en lasser au point de ne plus tolérer de se laisser consumer par lui? Est-ce la question que se posent les cyrénaïques et la subjectivité du plaisir ? Est-ce la question que se posent les épicuriens et l’utopie ataraxique ? Est-ce la question que ne se posent pas les hédonistes et leur recherche du plaisir en tant que fondement de la morale ?
Le plaisir est-il maximum dans l’état fébrile qui conduit à sa découverte ou dans l’état béat de celui qui l’a enfin découvert ? Faut-il n’avoir peur ni des foudres célestes ni du squelette à la faux ravageuse pour y parvenir ? Faut-il avoir atteint la sagesse pour être en capacité d’apprécier le plaisir ? Si oui, quelle était la quête originelle ? Faudrait-il que pour être conquis il ne soit que raisonné ? Peut-il encore, dans ces conditions, mériter le qualificatif de plaisir ?
J’ai eu un plaisir fou…Sans la folie, quid du plaisir ? Il ne pourrait exister dans la raison ? Les gens raisonnables peuvent-ils donner du plaisir ? Faut-il d’abord être fou, puis raisonnable, ensuite devenir sage et enfin n’avoir plus de besoins pour mesurer tous les bienfaits du plaisir ?
Il semble bien que le besoin que l’on a ou que l’on nous crée soit le moteur de recherche du plaisir ! Quel est le mot clé ? Qui va le valider ?
Quel est le rapport du plaisir à la mémoire ? Se souvenir du plaisir des moments agréables est un plaisir rare…C’est la cerise sur le gâteau de celui qui n’a pas de regrets, et plus de besoins. Celui qui perd la mémoire peut-il avoir quelque plaisir à vivre sachant que demain ne sera plus étayé par le souvenir des plaisirs d’aujourd’hui ?
Quel est le rapport du plaisir à l’expérience ? Si celle-ci est cimentée par le déplaisir des échecs d’hier, n’est-elle pas l’outil de la recherche du plaisir de demain ? Un plaisir peaufiné, pesé, mitonné, repoussé et repris, comme un chat se joue de la souris avant de la consommer…
Le chat…une bête à plaisir ! Le félin est le seul être qui ronronne, les autres ronflent ! Il y a sans doute quelque chose à creuser du côté du chat ! Le chat nous donne-t-il du plaisir ? Si oui, où serait le plaisir sans la peur du coup de griffe ? Le danger doit-il accompagner la recherche du plaisir pour atteindre au bonheur de l’avoir conquis ?
Doit-il se vautrer dans l’interdit pour être médaille d’or ? Médaillé du plaisir ! Les Olympiades du plaisir restent à inventer ! Le délire est-il un aphrodisiaque du plaisir ? Jusqu’où l’homme peut-il aller dans la conquête du plaisir ? Le pouvoir est-il un outil ou une conséquence du plaisir ?
Il en est un qui vient de se faire plaisir ! Ni drogue, ni interdit, que des questions ! Comme si son besoin était de poser des questions ! Sans doute pour vous permettre de chercher les réponses ! Savoir et connaître, quel plaisir !
Bernard Dausse
PLAISIR
Vertige face aux délices de saveurs,
De parfums, face à la grâce de quelques pas,
Régal, tourbillon.
La joie est sucrée, parfumée de vanille.
Plongée dans les couleurs, dans la musique,
L'âme est en fleur.
A travers les dédales des notes,
La mélancolie s'efface.
Je reste en équilibre
Mon cœur est tendu
Comme une corde de guitare,
Il s'imprègne de musique.
J'ai la chair de poule
Devant un plaisir si parfait.
Micheline Boland
LA GRÂCE-MATINÉE
C’est un beau matin pluvieux, un matin de nonchaloir.
Les idées papillonnent sans vouloir se structurer ; les projets s’amoncellent : trésors celés à exhumer une prochaine pluie, éphémères à jamais oubliés.
Et la raison résonne comme un remords raisonneur : repassage, … vaisselle, … courses, … aspirateur …
Peine perdue ! Depuis longtemps déjà mes oreilles aguerries, feuille-de-songe et plume-canard, laissent s’écouler, s’évaporer les gouttes ennuyeuses.
Un livre s’ouvre, une page se caresse du regard, de la pensée.
Poésie ou prose, qu’importe !
La porte de l’imaginaire, à peine entrebâillée, laisse les mots s’engouffrer, jouer, danser, ricocher sur les murs de la mémoire.
Parfois un gros dictionnaire fait de sacrées invites, aguicheur en diable sous la rouge jaquette pleine de promesse.
Il y a toujours un sens à découvrir, un synonyme à happer, un juste terme à chiner pour fignoler un poème, un vocable tout neuf à savourer : isoète, hyacinthe, éolithe, hyalin, épicène …
Et me voilà embarquée pour une parenthèse au long cours…
La grasse matinée !
Monique Mérabet
PLAISIR… RELATIF…
Plaisir subtil que d'écrire
Quelques mots…
C'est ton âme qui soupire
En son trop
Plein d'espoirs, ou de délires :
Ce roseau
Pensant, l'homme qui chavire
Sur les flots
Mais se redresse pour rire :
Pauvre idiot !
Que te sert-il de gémir,
De pleurer ?
Puisqu'un jour tout doit finir ?
L'encrier
Ne t'offre-t-il le plaisir
Sans compter
Étrangement, sans sourire
Sans juger
De t'inviter à noircir
Du papier… !
Ne boude pas ton plaisir
Cher humain
Il est somme toute pire
D'être un chien !
Manifestant son plaisir
Son chagrin
N'ayant que sa queue pour dire
S'il est bien
Ou qui, triste, se retire
Dans un coin…
Germaine Cartro
La couleur de tes yeux épouse les saisons,
Libère l'attente qu'ils tiennent prisonnière..
Toute vérité n'est qu'un grain minuscule,
Qu'une béquille d'infirme
L'homme libre est le seul à l'entr’apercevoir,
Et encore,
L'aube à l'aurore a promis le jour,
Mais ne lui a rien dit de la nuit.
Oui je suis abîme et source et peut-être un peu homme.
Sous ton fard dernier masque avant le mensonge,
Sous ton vêtement, peau choisie par toi,
Quelle est ta vérité aux couleurs de rêves ?
Les formes dérobent nos pensées ;
Nous allons offrandes sans donateur
Refuser l'horizon pour mieux voir l'au-delà.
Je t'ai offert mon cœur, tu as pris ma flamme,
Le feu et le foyer tu voulais toutes choses,
Mais nos objets sont les heures de la vie.
Robert Hugues Boulin
"les Buissons du langage"
LE TROQUET
I.M. Verlaine – Fombeure – Vérane – Hemingway
Au troquet du "Coin"
(Qui n'est pas forcément dans un angle)
refuge de conversations, de conversation
par l'alcool et la fumée,
pour se rafraîchir, pour se réchauffer
se réunissent toutes les races :le petit noir et la noisette,
le coup de blanc et le pied-noir,
le rouge-bord, l'izarra jaune,
les beaux,
les bons,
ceux qui ont la tête près du bonnet ;
et les buveurs de tout milieu :
l'ambassadeur et le kir,
le saint-raphaël, le cinzano,
la saint-yorre et la gnôle,
les vermouths, les quinquinas,
les armagnacs, les muscadets,
les alsaces, les bordeaux,
les bourgognes, les beaujolais,
tous un peu chauvins cependant
quand ils ont Marianne dans l'œil.
On est Paris, on est province,
Un peu fou, même aligoté,
Comme au temps du noah, de l'absinthe-absence.
Sur le zinc on joue au quatre cent vingt et un
Et aux cirrhoses
Car souvent on bis trop.
Ô poésie des verres boit-tout !
Michel Martin
DÉLICES
A l'aube des nuits étoilées, l'amour unit les chairs
De nos corps enlacés au creux des lits.
Oh ! souffle doux du sommeil, tel un chuchotement.
Nous marcherons dans les petits matins givrés,
Oublieux de notre repos,
Nos lèvres scellées par les mêmes serments.
Amants couchés sur la mousse des bois,
Des mains d'homme palpent des seins,
Contours aux galbes si ardemment désirables,
Parfum aux sensations de flirt qui durent en nous,
Pareil aux prémices d'un amour vrai.
Femme, source de plaisir, dans ton intimité
Nous nous blottirons.
Homme, origine de la force, sous ton regard
Nous vaincrons le jour.
Les corps s'articulent …
Brigitte Neulas